Le Laos: au cœur de RCEP
En 1995, le premier ministre malais Mahathir bin Mohamad a lancé l’idée de la zone économique du sud-est asiatique, gravitant au tour d’une ligne de chemin de fer. Elle devait partir de la ville chinoise KunMing, pour arriver à sa destination finale au Singapour, en sillonnant les pays comme le Vietnam, la Thaïlande, le Laos, le Myanmar, le Cambodge, et bien sur, la Malaisie. Elle a été nommée Trans-Asian Railway, TAR
C’est le cœur de l’actuel projet RCEP, le point de départ du gigantesque projet de la nouvelle route de la soie, si cher à XiJinPing.
Comme quoi, les chinois n’ont pas cherché à réinventé la poudre.
C’est une idée de génie mais le projet a pris beaucoup de retard et a subi beaucoup de tempêtes géostratégiques et politiques. A l’heure où le projet RCEP est programmé pour une entrée en vigueur le 1er Janvier 2022, la ligne KunMing – Vientiane sera officiellement inaugurée au Laos le 2 Décembre 2021, le jour de la fête nationale.
L’économie du pays en sera transformée. Près de 9% de GDP laotien a été investi dans cette ligne, cela représente énormément pour les laotiens. Mais l’immense majorité de l’investissement a été assumé par la Chine qui en a les moyens.
Les 1022Km qui séparent KunMing de Vientiane seront parcourus en moins de 10 heures. Il est plus que certain que de riches touristes chinois vont débouler au Laos dès 2022. Espérons que le Laos saura préserver son environnement et maîtriser l’inflation notamment dans l’immobilier.
Mais les changements ne vont pas s’arrêter là. Cette ligne mettra une main d’œuvre peu chère aux usines chinoises qui pourraient y délocaliser une partie de leur production de pièces détachées. L’assemblage final restera sans doute en Chine continentale. Ainsi, la Chine préserve son avantage sur le coût de production sans perdre la maîtrise de la chaîne d’approvisionnement. Le Laos est assez proche de la Chine.
Ce qui n’est pas le cas des autres pays traversés par la TAR. Le Vietnam se méfie de son grand voisin du nord et tente de tirer profit de la guerre froide sino-américaine.
La Thaïlande essaie de jouer au jeu d’équilibriste entre les 2 grandes puissances mondiales, tandis que le Myanmar s’engage sur le chemin de l’instabilité.
Le seul autre partenaire fiable pour la Chine est le Cambodge. Et ce dernier a un avantage majeur que son voisin laotien n’a pas: un accès à la mer. Ceci ne peut échapper aux stratèges chinois. Si la TAR change d’itinéraire pour aboutir à un port Cambodgien, cela permet non seulement de désenclaver le Laos, mais aussi la ville KunMing dont le développement est justement limité par sa situation géographique qui est loin de la mer.
Cela ne remet pas en question les intérêts malais et singapouriens, car la pointe sud du Cambodge n’est qu’à quelques jets de pierre de ces pays par la voie maritime.
Tout se repose sur le succès laotien. Tout le sud-est asiatique a les yeux braqués sur le Laos, ce petit pays enclavé et si paisible. Il sera au cœur du point de départ d’un grand jeu sur l’échiquier mondial en 2022.
Bonne chance à nos amis laotiens, espérons qu’ils prennent le bon train.