L’histoire de la variole en Chine
Nous sommes en 1661, l’Empereur ShunZhi: 顺治 ( de la dynastie Qing des Mantchous ) est mourant après avoir contracté la variole.
C’est alors qu’un homme lui donna un avis éclairé: mettre le très jeune prince cadet âgé de 6 ans sur le trône. La raison ? Le petit avait survécu à la variole, et n’aura très probablement plus à affronter la maladie de toute sa vie. Cet homme se nomme Johann Adam Schall von Bell, un jésuite allemand au service de la cours impériale mandchou à Pékin.
Le jeune empereur âgé de 6 ans portait alors le nom de règne KangXi:康熙. Ce fut le début d’une très longue période de paix et de prospérité en Chine. Il a stabilisé les frontières, consolidé les relations avec le Tibet. Ces réformes, progressistes pour l’époque, ont contribué à l’essor économique et culturel de l’empire.
En 1682, il ordonna la généralisation de la variolisation ( 种痘 ) dans tout l’empire. Cette énorme campagne de variolisation imposée par un décret impérial a fait grand bruit à l’époque. La Russie fut le premier pays à avoir envoyé une délégation pour étudier cette vieille technique connue depuis les temps anciens en Chine.
En effet, de l’autre coté des frontières du grand nord, régnait une souveraine tout aussi éclairée que KangXi: Catherine II de Russie.
Grande amie des philosophes lumières, instruite et très cultivée, elle a aussi participé activement au développement de la variolisation dans son empire. Pour ce faire, elle s’est faite varioliser elle-même et a survécu à l’épreuve.
En Chine, on arrive à trouver des traces d’écrits des symptômes de la varioles au premier siècle.
Cette maladie était alors inconnue et incurable. Elle aurait été introduite après avoir capturé des prisonniers de guerre sur les territoire de l’actuel Vietnam.
Pendant des siècles, la variole était un tueur contre lequel, les médecins chinois étaient totalement désarmés. On pense que c’est sous la dynastie de Tang au 7ièm siècle qu’on aurait découvert la technique dite du vêtement variolisant.
Cela consistait à faire porter le vêtement d’un malade par un enfant sain afin que celui attrape la maladie pour acquérir, s’il y survit, l’immunité. C’était l’ancêtre de la variolisation.
Puis, sous la dynastie de Song, vers la fin du 11ièm siècle, la variolisation est née sous sa forme la plus connue. Elle consiste à préparer la substance suppurant des vésicules d’un malade en le mettant sous forme de poudre. Puis, on le souffle par le biais d’une tige dans le nez du sujet à varioliser.
Sous la dynastie de Qing, un médecin pas très connu du grand public: YuMaoKun 俞茂琨 a beaucoup étudié la variole et a mis au point une technique plus moderne de la variolisation. Il l’a décrite dans un ouvrage dédié à ses études de la maladie : La variolisation 种痘法.
Plus tard, le célèbre médecin ZhuYiLiang 朱奕梁 a écrit dans un autre ouvrage dédié à la variolisation: Le traité de la variolisation, la manière la plus sûre de de préparer l’inoculation.
Dans cet ouvrage, il souligne la grande dangerosité de la substance initialement “cueillie” d’un malade, et le long processus intermédiaire permettant d’obtenir une substance avec beaucoup moins de dangerosité. Ce processus comprend pas moins de 7 variolisations intermédiaires, et diverses méthode de prélèvement, de préparations de substances sous différentes formes: liquide, poudre …
Peu à peu, la variolisation a été adoptée par pratiquement le monde entier.
En France, à l’instar des vaccins contre le covid19, la variolisation provoque des débat houleux. Des gens comme d’Alembert, encyclopédiste, vont être très opposés à cette pratique alors que Voltaire, par exemple, va être beaucoup plus favorable à cette technique médicale.
C’est en 1790 que le britannique Edward Jenner fait une découverte qui va en faire le “père” de la vaccination. Il s’est rendu compte que les personnes qui travaillaient avec les vaches n’attrapaient jamais la variole parce qu’elles avaient une autre maladie, inoffensive pour les humains, qui s’appelait la ‘vaccine’.
Edward Jenner a eu l’idée d’utiliser ce virus de vache en l’inoculant volontairement aux humains pour les empêcher d’attraper la variole. C’est comme ça qu’on est passé de la variolisation à la vaccination. Le mot ‘vaccin’ vient en fait d’un virus de vache.
Mais l’histoire de la variole en Chine n’est pas terminée pour autant.
En 1924, la Chine est dans un état catastrophique. Des centaines de millions de gens pauvres, malades, affamés et illettrés s’entassaient sur un tas de ruine encore fumante. Les maladies comme la variole menaçaient de faire des ravages que l’état chinois ne pouvait pas contrôler.
La Chine avait besoin de vaccin contre la variole. Mais le problème est que la technologie de fabrication de vaccins est maîtrisée par l’Occident. Et de toute façon, la Chine n’avait pas l’infrastructure pour en fabriquer.
Un comble pour le pays inventeur de la variolisation qui n’avait pas hésité à la transmettre au monde entier.
C’est alors qu’un homme, QiChangQing 齐长庆 s’est mis en tête d’en fabriquer avec ses propres méthodes en se basant sur ses expériences réussies du vaccin contre la rage.
S’inspirant des méthodes décrites dans le traité de la variolisation, il s’est servi des animaux comme le singes pour obtenir un vaccin encore plus efficace que tous les vaccins de l’époque. On le nomma: 天坛株
Son vaccin a même été utilisé par les troupes des alliés stationnées en Asie durant la seconde guerre mondiale.
En 1950, la toute nouvelle république populaire a ordonné une campagne de vaccination obligatoire contre la variole dans tout le pays avec le vaccin de QiChangQing.
Son vaccin est tellement efficace que le dernier cas guérison totale de variole date de juin 1961, alors que le dernier cas hors Chine est en Somalie et date du 26 octobre 1977.
Dernier patient de variole chinois: HuXiaoFa 胡小发。date de la guérison: Juin 1961
Avec le dernier patient chinois de la variole, HuXiaoFa 胡小发 clore un très long chapitre dans l’histoire de la médecine chinoise en 1961, soit, 16 ans avant le dernier cas hors Chine.