Chine – URSS – Ouïghours: le FarWest, c’était toute une aventure
Depuis la naissance du premier empire Chinois: Qin, en -221, le premier Empereur de Chine a déjà compris le principal point de faiblesse de son vaste territoire: le territoire à la frontière de l’Asie centrale – le farwest chinois.
Il y dépêcha un contingent militaire pour garder un œil sur les tribus nomades qui y vivaient et devenait puissantes. En l’an 60 avant l’ère commune, sous la dynastie des Han de l’Ouest, ce vaste territoire de 2 Millions de kilomètre carrés, soit plus d’un tiers du territoire terrestre de la France actuelle, passe sous contrôle de l’Empire chinois. Il était contrôlé par une administration dédiée nommée: 西域都护府 ( L’administration de défense de la capitale des régions de l’Ouest ).
Un bon paquet de siècles et de guerres perdues plus tard, la République Populaire de Chine est proclamée. La première tâche ardue à laquelle, la jeune ( pauvre, faible et fragile ) république s’est attelée, est celle de stabiliser ses très longues frontières. Tout se passait relativement bien, sauf pour cette région, à la porte de l’Asie centrale.
Les négociations devait avoir lieu avec Moscou, les maîtres de la région depuis 200 ans. Mais sur fond de crise sino-soviétique dans les années 60, aucun des deux pays socialistes ne veut céder un pouce. Et pour ne rien arranger, cette région aux reliefs géographiques et histoires complexes est très compliquée à “découper”.
Les revendications chinoises sont principalement basées sur le fait qu’elle ait été obligée de signer des traités inégaux suite aux défaites militaires de l’Empire Mandchou face aux puissances coloniales au 19iem siècle. En ce qui concerne le grand Ouest, les traités d’Aigun (1858), de Pékin (1860) et d’Ili (1881) ont été cités et dénoncés par la partie Chinoise comme inégaux. Mais Pékin ne les a pas déclarés nuls et non-avenus. Cela aurait été trop risqué.
Cela dit, la somme des surfaces des territoires que la Chine considère comme “volés” vers la fin de l’Empire des Mandchous par la Russie Tsariste arrive à 1 500 000 km2, soit pratiquement 3 fois la surface de la France.
Des négociations ont eu lieu tout au long des années 60 malgré des incidents frontalier sino-soviétiques ayant causé des pertes humaines des deux cotés.
Elles ont été interrompues d’abord par la destitution de Khrouchtchev le 15 Octobre 1964, puis la révolution culturelle coté chinois a définitivement mis à l’arrêt toute négociation à ce sujet.
C’est seulement en 1988 que les deux pays arrivent enfin à avancer de manière concrète à ce sujet. Un groupe de cartographes comprenant des spécialistes des deux pays a fait des relevées afin de faciliter les négociations.
Au printemps 1989, lors de la visite historique de Gorbachev à Pékin, en plein mouvement des étudiants en Chine, Deng XiaoPing et Gorbachev sont tombés d’accord pour finir ce que les deux pays avaient commencé 30 ans plutôt.
Un certain nombre d’accords ont été signés jusqu’à ce que la Chine tombe sur un nouvel obstacle de taille: l’éclatement de l’URSS.
L’avantage de l’URSS est qu’il n’y en avait qu’un pays avec qui parler. Et il était aisé de parvenir à un compromis si la Chine cède sur les contentieux territoriaux vers le fleuve amour à l’Est, elle aurait pu avancer sur l’Asie centrale avec plus de facilité. Mais avec la disparition de l’URSS, les chinois devront négocier avec le Kazakhstan, le Kirghizstan et le Tadjikistan sans oublier la Fédération de la Russie. Aucune des nouvelles républiques de l’Asie centrale ne voudra céder du territoire aux Chinois. Et la Chine perd toute marge de manœuvre pour des compromis à l’Est. La partie se complique.
La Chine va devoir faire des sacrifices mais pas pour les raisons qu’on pourrait croire.
En effet, les négociations avec les kazakhs ont rapidement abouti… à l’absence quasi-totale de revendication chinoise ! Mais pourquoi?
En effet, le président kazakh avait fait des promesses à la Chine concernant les mouvements ouïghours à partir de 1992, plus précisément en 1993 et une nouvelle fois en avril 1994 et qu’en outre, dès 1993, le Kazakhstan offre des garanties à Pékin concernant sa sécurité en général en promettant de ne participer à aucune alliance politique ou militaire tournée contre la Chine et en s’engageant à ne pas autoriser que son territoire serve de base à d’éventuelles activités menées par une puissance tierce contre la sécurité ou la souveraineté de la Chine.
Quant au Tadjikistan, l’accord est signé Le 17 mai 2002. Pékin renonce à 95% des zones initialement revendiquées 40 ans auparavant ! Des renoncements similaires ont été observés avec le Kirghizstan.
En effet, le Tadjikistan est voisin de l’Afghanistan. Et la situation y est bouleversée notamment après le 11 septembre 2001
L’arrivée de l’OTAN dans la zone a du mettre la pression sur pékin pour qu’il évite à tout prix, toute source de contentieux avec les autres voisins de l’Asie centrale, afin que celle-ci ( source de contentieux ) ne soit pas instrumentalisée par une puissance étrangère.
Avec cette série d’accords signés début 2000, beaucoup de chinois reprochent au président chinois Jiang ZeMin d’avoir “cédé” d’immenses territoires par peur. Je pense que ces reproches n’ont pas lieu d’être: Les raisons d’état n’ont parfois pas besoin d’explications.